Le monde entier ou presque est désormais au courant : une Britannique de 47 ans au physique banal mais sachant chanter, Susan Boyle, a fait un tabac lors d'une audition à l'émission Britain's got talent.
La vidéo dure 7 minutes, et donne envie de botter quelques culs.
Non, Susan Boyle n'est pas l'héroïne d'un conte de fées. Elle est une femme apparemment charmante, entre deux âges, sélectionnée par les recherchistes d'une émission télé, envoyée sur une scène pour susciter des réactions précises de la part du public, dans les limites de temps imparties (candidats, pubs, candidats, pubs, etc.)
Dans un premier temps, le mépris, les sifflets, les rires. Eh oui, que voulez-vous, c'est devenu tellement rare de voir monter sur scène des femmes qui n'ont pas le look de call-girls anorexiques. Mama Cass Elliot -gloire éternelle à son immense talent- aurait bien du mal à percer de nos jours sans se faire au préalable brocher l'estomac et liposucer de la tête aux pieds.
Dans un deuxième temps, le trip émotionnel. Comme au bon vieux temps des jeux du cirque à Rome, le public a gracié la candidate jetée aux lions et s'est ému de sa propre générosité. Car si Ms Boyle avait foiré son tour de chant, la salle ne lui aurait pas pardonné son physique peu gracieux et aurait réclamé sa tête (symboliquement parlant bien sûr).
Susan Boyle n'est pas la princesse d'un conte de fées, non. Elle a été traitée comme une marchandise, un objet -momentanément- utile: elle a été enrôlée par une production dans le but de générer un buzz médiatique. Sauver des princesses en détresse, c'est pas vraiment le but de ce business de caniveau que l'on nomme "télé réalité".
L'objectif était avant tout de faire parler de Britain's got talent (je connaissais de nom l'équivalent US, America's got talent, mais pas la version britannique), de faire ENCORE parler de ce nobody que tout le monde appelle familièrement "Simon" comme si c'était un gendre ou un beau-frère (c'est qui ce type? je ne l'ai jamais entendu chanter quoi que ce soit... je ne lui connais que ce rôle de "juge" qui gagne sa vie en humiliant publiquement des paumés assoiffés de gloire), ainsi que deux inconnus: une certaine Amanda Holden (j'ai retenu son nom pour l'avoir lu dans le titre d'un clip sur YouTube où elle se fait mousser sur le dos de Susan Boyle) et un gommeux dont je ne suis même pas fichu de me rappeler le prénom, encore moins la profession.
Le public a gobé l'appât, l'hameçon, et la ligne. Les "juges" ont joué la comédie qui convenait : d'abord les remarques méprisantes pour faire rire le public, l'inciter à moquer et huer une brave dame, puis la surprise feinte lorsque Ms Boyle commence à chanter.
Les exploiteurs qui l'ont recrutée et exhibée vont toucher leur salaire, mais Susan Boyle, elle, que va-t-elle gagner dans cette affaire? Faire un disque? Peut-être, mais ce sera aux conditions de ses nouveaux employeurs, fermement tenue en laisse par un contrat bétonné. Quant aux menus inconvénients de la célébrité, elle en a déjà un avant goût: des illuminés la traquent jusque chez elle, dans son petit village.
Espérons qu'au moins elle puisse s'amuser en chemin, et traverser la mare aux piranhas sans trop de dommages.
Espérons également que le public se décidera bientôt à boycotter ces émissions basées sur le bizutage, l'humiliation, la soumission, la mise en concurrence féroce, le conformisme le plus abject (huer une femme parce qu'elle n'est pas belle, par exemple), la glorification de la sournoiserie et du chacun-pour-soi.
Voilà qui ferait une vraie happy end.
lundi 27 avril 2009
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